Quel est l’intérêt des boissons végétales du commerce ?
Sont-elles une bonne alternative au lait de vache ?
Comment les choisir : enrichies ou pas ? bio ou pas ? Soja ou amande, noisette, avoine, riz, coco, … ?
Voici un éclairage nutritionnel pour guider vos choix parmi les boissons végétales 🥛
Qu’est-ce qu’il y a dedans ?
Les « laits végétaux » sont constitués majoritairement d’eau (dans une proportion équivalente à celle du lait de vache) et de purée ou farine de graines, noix ou céréales (soja, amande, riz, avoine, noix de coco, épeautre, noiset pomme de terre, pomme de terre,pomme de terrepomme de terrpomme de terpomme de tepomme de tpomme de pomme depomme dpomme pommepommpompope, châtaigne, cajou, chanvre, pois, pomme de terre, …) pour 2 à 15% du total.
Pour le goût, peuvent s’y ajouter : du sel, du sucre, des arômes naturels, du caramel, du chocolat, de la vanille, du thé matcha, …
Pour améliorer leur valeur nutritionnelle – et seulement pour les produits non bio – ils peuvent être enrichis en :
Calcium, sachant que le calcium issu de l’enrichissement est absorbé quasiment aussi bien que celui du lait de vache (1),
Vitamines B2 (riboflavine), B12, qui sont naturellement présentes dans le lait de vache,
Vitamine D, que l’on trouve aussi dans les laits de vache enrichis (2),
Vitamine E, dont les propriétés antioxydantes en font un additif intéressant pour la conservation,
Fibres (inuline, fibres de chicorée, …).
Pour améliorer les qualités organoleptiques (texture, homogénéité, …), on peut aussi y trouver d'autres additifs (stabilisants, émulsifiants, correcteurs d'acidité, …) :
En bio, par exemple, on peut trouver (mais pas systématiquement) de l’amidon de riz, de tapioca, de manioc, … de la farine de graine de caroube, de la maltodextrine de maïs, de l’huile de tournesol, …
En "non bio", on peut trouver de la gomme gellane, gomme guar, gomme xanthane, des carraghénanes, des lécithines (de tournesol, …), des phosphates (de potassium, de calcium, …), …
Alors, faut-il les prendre bio ou pas ?
Le dilemme se résume simplement : préfère-t-on du calcium ou moins d’additifs ?
Si l’on opte pour le bio, l'avantage c'est qu'il n'y a pas ou peu d'additifs. L'inconvénient c'est que l'on n'y trouve plus beacoup de boissons végétales enrichies en calcium. En effet, un arrêt de la cour de justice européenne interdit dorénavant l'algue lithothamnium calcareum non bio qui était utilisée jusqu'ici pour l'enrichissement en calcium des boissons végétales biologiques (3).
Les boissons bio ne peuvent par ailleurs pas être enrichies en vitamines B2, B12, etc. (4)
Or, sur le plan nutritionnel, le rôle du lait dans l’alimentation est de fournir plus particulièrement :
Des protéines … ≈ 8% des besoins quotidiens d’un adulte
De la vitamine B2 et B12 … ≈ 15% des besoins quotidiens d’un adulte
Du calcium … ≈ 20% des besoins quotidiens d’un adulte
Alors, une alternative au lait qui ne contient pas de calcium… 😬, ça a moins d’intérêt...
Et si l'on opte pour le "non bio", il y a généralement du calcium (5), mais il y a plus d’additifs 😩… Qu’en penser ?
L’enrichissement des boissons en calcium se fait le plus souvent avec du carbonate de calcium (minéral naturel, présent dans le calcaire), qui est un additif reconnu sans danger.
Il se fait aussi parfois avec du phosphate de calcium ou du phosphate tricalcique, additifs multifonctions abondamment utilisés dans l’industrie agro-alimentaire et moins appréciés de ce fait (6).
L'autre additif que l'on rencontre dans les boissons végétales, qui n'a pas toujours bonne presse et qui est très utilisé par l'agro-alimentaire, ce sont les carraghénanes (extraits de varech aux propriétés épaississantes et gélifiantes), avec beaucoup d'informations contradictoires et de polémiques à leur sujet. Aujourd'hui, "UFC Que choisir" classe ces extraits d'algues dans la catégorie "tolérable" (7) et les différentes autorités sollicitées depuis le début des années 2000 (l'EFSA, autorité européenne de la sécurité alimentaire, le JEFCA, comité mixte FAO/OMS d'experts des additifs alimentaires, ...) les ont déclarées sans danger (8).
Conclusion ? Selon moi, dans une alimentation sans produits laitiers, il est difficile d'atteindre des apports suffisants en calcium sans intégrer des aliments enrichis. Je ferais donc une concession sur les additifs pour sécuriser des apports en calcium suffisants avec des boissons enrichies, en limitant par ailleurs les aliments ultra-transformés pourvoyeurs d'additifs.
Soja ou amande, noisette, avoine, riz, coco, … ?
Les 6 boissons les plus courantes sont à base de soja, amande, noisette, avoine, riz et coco. On peut aussi trouver des boissons ou des mélanges à l’épeautre, cajou, sarrasin, lin, chanvre, quinoa, millet, macadamia, chia, pois, pomme de terre, …
Sur le plan du goût, chaque boisson a sa « personnalité » et chacun aura ses propres préférences.
Sur le plan nutritionnel :
Les boissons au soja ont un atout indéniable : ce sont les seules qui offrent un apport en protéines (≈3,3g aux 100ml) similaire à celui du lait ; des boissons aux pois ou pois chiches ont récemment vu le jour, avec ≈ 2 à 2,5g de protéines aux 100ml (moins que les boissons au soja mais plus que les autres boissons).
Les boissons au riz sont celles qui contiennent naturellement le plus de sucres (et un indice glycémique plus élevé), même quand elles sont sans sucres ajoutés,
Pour les autres nutriments tels que le fer, le zinc, le magnésium, les omégas 3, … qui sont naturellement présents dans certains ingrédients utilisés (9), il est difficile de départager les différentes boissons car ces nutriments ne sont pas mentionnés dans les valeurs nutritionnelles des produits. Soit parce qu’ils ne s’y retrouvent pas en quantités suffisantes pour être mentionnés, soit parce que les teneurs sont trop variables (selon l’origine de l’ingrédient, la récolte, …).
Mais quel que soit l'ingrédient de base, il sera toujours préférable d'opter pour une boisson qui contient moins de 3,5g de sucres aux 100ml pour les boissons nature et moins de 5g de sucres aux 100ml pour les boissons aromatisées (chocolat, vanille, ...).
Mais... le soja, est-il bon pour la santé ? Oui !
C'est un aliment qui possède un profil nutritionnel particulièrement intéressant : protéines, fer, vitamines K1, B9, B1, B2, acides gras polyinsaturés (oméga 6 et 3), calcium, ...
En France, le soja est décrié à tort. Pour plus d'informations, lire la position de l'ONAV relative à la consommation alimentaire de soja et à son action sur la santé humaine (10).
Parenthèse environnementale : les boissons végétales sont-elles plus écologiques que le lait de vache ? Oui, d'après la littérature, à la fois du point de vue des émissions de gaz à effet de serre, de l'utilisation des terres et de la consommation d'eau. Y compris pour les boissons à l'amande, même si celles-ci consomment plus d'eau que les autres. L'infographie ci-dessous s'appuie sur les données d'une étude de l'université d'Oxford publiée dans le magazine Science.
Infographie adaptée de C. Guibourg et H. Briggs sur BBC.com (11)
Recommandation selon votre profil de consommation
S’il s’agit pour vous d’une boisson occasionnelle dans le cadre d’une alimentation omnivore, choisissez-la selon votre goût et avec le moins de sucres ajoutés possible (< 3,5g pour les boissons nature à <5 g pour les autres, aux 100 ml).
S’il s’agit d’une boisson que vous consommez régulièrement à la place du lait, prenez-la :
enrichie en calcium (donc non bio d'ici peu),
au soja si vous avez besoin de booster vos apports en protéines,
et éventuellement enrichie en vitamines B12, B2 et D, c'est toujours ça de pris. Mais il faut garder en tête que même avec 3-4 portions d'aliments enrichis par jour (boissons, céréales du petit déjeuner, alternatives aux yaourts, ...), cela ne suffit pas pour couvrir les besoins en B12 des végétariens/végétaliens, qui doivent se supplémenter en B12 par ailleurs (12) (13).
Et pour les enfants ?
Tout comme le lait de vache, les boissons végétales sont inadaptées pour les enfants de moins de 1 an.
Quand l'allaitement n'est pas/plus possible ou non souhaité, seules les préparations pour nourrissons ou lait infantiles (1er âge, 2e âge, lait de suite) sont adaptées jusqu'à 1 an, qu'elles soient à base de lait de vache, de riz, ou mixte (végétal / lait de vache).
Pour les 1 à 3 ans, il existe aussi des préparations infantiles 3eme âge (ou de croissance) végétales, enrichies notamment en fer, zinc et acides gras essentiels.
Et en cuisine ?
En premier c'est une affaire de goût !
Quand on veut un goût neutre, doux, il me semble que les boissons à l'avoine et à l'épeautre sont les plus indiquées.
Celles à l'amande, à la noix de coco, à la noisette, ... pourront être utilisées pour conférer leur goût particulier aux recettes.
Et il y a aussi des considérations plus techniques. Les recettes qui nécessitent une coagulation des protéines seront plus faciles à réaliser avec une boisson au soja : yaourts, béchamel, blinis ou crêpes (même si on peut les réussir aussi avec d'autres boissons).
Au contraire, si l'on veut éviter une réaction de coagulation (dans une préparation qui va bouillir, une préparation acide), on évitera le soja.
J'espère que cet article vous aura été utile !
Notes et sources
(1) Le calcium des boissons au soja. G. Joubrel et al, Pratiques en nutrition, N°34, avril-juin 2013
(2) Par adjonction dans le cas de la vitamine D, car la teneur du lait de vache en vitamine D est très variable et globalement faible, même dans le lait entier. Elle est ajoutée par certaines marques de lait car la vitamine D permet d’améliorer l’absorption du calcium.
(3) Jusqu’en juillet 2022, l’enrichissement en calcium des boissons végétales se faisait par ajout d’un ingrédient naturel, le lithothamnium calcareum, une algue marine contenant du carbonate de calcium et généralement d'origine non biologique. Mais un arrêt européen de 2021 en interdit dorénavant l’ajout dans les produits biologiques si elle n'est pas elle même d'origine biologique.
En effet, interpellée par la Cour administrative fédérale Allemande pour interpréter le règlement (CE) n° 889/2008 relatif à la production biologique, la cour de justice européenne a dû constater que le droit de l’Union s’opposait à « l’utilisation d’une poudre obtenue à partir des sédiments de l’algue Lithothamnium calcareum qui sont nettoyés, séchés et broyés, en tant qu’ingrédient non biologique d’origine agricole […], dans la transformation de denrées alimentaires biologiques telles que des boissons biologiques à base de riz et de soja, aux fins de leur enrichissement en calcium »
Depuis, quelques fabricants de boissons végétales ont réintroduit cette algue, sous une origine biologique, dans leurs boissons. Nutritionnellement, c'est bien. Mais sur le plan environnemental, il semble que la récolte de cette algue ne soit pas souhaitable pour la préservation des écosystèmes marins, même si malheureusement, elle est aussi récoltée pour d'autres fins, comme l’amendement des sols agricoles par exemple…
L'idéal, ce serait que l’ajout de calcium soit autorisé en bio sous forme de carbonate de calcium. C'est un additif sans danger, autorisé en bio… mais pas pour l’enrichissement des aliments en calcium… quel dommage !
Source : Règlement européen (UE) 2021/1165 qui liste les substances (additifs, …) autorisées en agriculture biologique - ANNEXE V
(4) Dans le bio, seule une cinquantaine d’additifs sont autorisés, majoritairement d’origine naturelle comme l’acide citrique (jus de citron), la lécithine, l’extrait de romarin, … contre plus de 300 dans l’industrie agro-alimentaire conventionnelle.
(5) Mais pas toujours ! Et que cela me désole, quand je vois de nouveaux entrants sur le marché des boissons végétales non bio qui n’enrichissent pas leurs produits en calcium !!
(6) Les phosphates (une forme de phosphore) sont des nutriments essentiels à notre santé. Cependant, ils sont déjà largement présents dans l’alimentation et très utilisés sous forme d'additifs. Les experts de l’EFSA (autorité européenne de la sécurité alimentaire) ont conclu en 2019 que les apports totaux estimés en phosphates pourraient dépasser le niveau de sécurité fixé par l'EFSA pour certaines populations (enfants/adolescents). Autrement dit, c’est la dose qui fait le poison, comme pour le sel, les graisses saturées, ...
(7) UFC Que Choisir classe les additifs en 4 catégories : Acceptable, Tolérable, Peu recommandable, A éviter.
(8) Avis de l'EFSA (2018) : https://efsa.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.2903/j.efsa.2018.5238
A noter : ce ne sont pas les carraghénanes qui sont toxiques mais leurs formes dégradées, comme les polyghénanes, forme obtenue en milieu très acide, à haute température sur une longue durée et qui n'est pas autorisée comme additif alimentaire. La confusion entre ces différentes formes a largement contribué à la polémique. La teneur en formes dégradées est limitée à 5%, selon le critère de pureté défini par la règlementation européenne.
Dans cet avis, l'EFSA conclut à la non-toxicité des carraghénanes mais, pour aller plus loin, demande que la quantité journalière acceptable de carraghénanes consommées soit réévaluée sous 5 ans. L'EFSA recommande aussi une définition chimique précise des carraghénanes comme additifs alimentaires (pour bien les distinguer des formes dégradées) ainsi qu'une méthode partagée par tous les laboratoires pour évaluer leur pureté (le critère de 5%) et l'obtention d'information sur la stabilité des carraghénanes dans les aliments.
(9) Apports notables aux 100g les plus intéressants dans les ingrédients bruts des boissons végétales :
Soja : protéines, fer, vitamines K1, B9, B1, B2, acides gras polyinsaturés (oméga 6 et 3), calcium
Amandes et noisettes : vitamines E, B2, acides gras monoinsaturés (oméga 9), fer + calcium pour les amandes
Avoine : fer, vitamine B1, zinc
Cajou : acides gras mono et polyinsaturés (oméga 9 et 6), vitamine K1, zinc, fer
Épeautre : fer
Graine de chanvre : oméga 3, fer, zinc, vitamines B1, B6, B9, E
Graine de lin : oméga 3, fer, zinc, sélénium, calcium
Graine de chia : fibres mucilagineuses, oméga 3, fer, calcium, zinc, vitamine B3
A savoir aussi : le soja cultivé en France est 100 % sans OGM car la culture d’OGM y est interdite et il n’engendre aucune déforestation.
(11) Infographie originale : https://www.bbc.com/news/science-environment-46654042
S'appuyant sur "Reducing food’s environmental impacts through producers and consumers", J. Poore et T. Nemecek, Sciences, Février 2018
(12) Informations fiables sur la supplémentation en B12 :
sur Végéclic : https://vegeclic.com/patient/informations-vitamine-b12/
sur Vegan Pratique : https://vegan-pratique.fr/conseils-nutrition-vegetalienne/la-vitamine-b12/
(13) Pour favoriser la transition vers une alimentation plus végétale, il serait nécessaire que les acteurs de l'agro-alimentaire adoptent des pratiques d'enrichissement en B12 plus conséquente, permettant de couvrir les besoins quotidiens des personnes qui réduisent leur consommation de produits d'origine animale.
J'ai analysé la réglementation et je ne trouve rien qui les obligent à se limiter à 15% des ARJ (apports recommandés journaliers), comme ils le font presque tous.
Le règlement européen (CE) 1925/2006 relatif à l'adjonction de vitamines et minéraux dans les aliments prévoyait que des quantités maximales soient fixées, mais cela n'a jamais été fait.
Il en est donc de la responsabilité des industriels de s’assurer que le niveau d'enrichissement ne fait pas courir de risque de surconsommation aux consommateurs. Or la vitamine B12 n’est pas toxique, même à doses très importantes (ex : 5000µg).
Pour la France, j'ai trouvé un avis de l'ANSES de 2009 qui fait une proposition de limite maximale à 2µg/100kcal, en tenant compte des anciens "apports nutritionnels conseillés" (ANC à 2,4µg/jour alors que le repère actuel est de 4µg/jour) et des apports quotidiens constatés dans l'étude INCA2 : https://www.anses.fr/fr/system/files/NUT2007sa0315t2.pdf
Même avec ces propositions très conservatrices, les fabricants de boissons végétales ont de la marge. 200 ml de boisson végétale nature font environ 100kcal. Avec 2µg de B12 par verre et des enrichissements similaires dans les alternatives aux yaourts, même les végéta*iens pourraient envisager de se passer de compléments alimentaires en B12.
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